L’analyse des couvertures de Playboy entre les années 1960 et 2000 révèle que les Playmates ont des yeux plus grands et des hanches plus larges quand le contexte économique est favorable. Décidément, comme on l'a déjà montré dans le billet d'hier, les scientifiques trouveront toujours de bonnes raisons de feuilleter Playboy...

Quelles femmes les hommes préfèrent-ils ? Petites, grandes, minces ou grosses ? Taille fine et larges hanches, grands yeux ou petits yeux ? Tout dépend de la conjoncture économique, selon les résultats d’une étude réalisée par les psychologues Terry Petitjohn et Brian Lungeberg, à l’Université de Meyhurst, aux États-Unis.
Ces derniers ont analysé en détail les dimensions du corps et du visage des « Playmates de l’année » du magazine Playboy, entre 1960 et 2000. Ils ont mesuré la largeur de leurs yeux, de leur taille et de leurs hanches, et... l’indice de qualité de la vie aux États-Unis ! Ce paramètre résulte d’un savant calcul qui prend en compte les chiffres du chômage, de l’inflation, du pouvoir d’achat des ménages, du produit intérieur brut par habitant, le tout pendant ces 40 années.
Ils ont constaté que les yeux des Playmates deviennent de plus en plus petits quand la conjoncture économique se fait plus difficile. Parallèlement, la taille s’élargit, les hanches deviennent plus étroites, et le tour de poitrine rétrécit. Au contraire, quand la vie est plus facile, on préfère les tailles fines, les grands yeux, les hanches larges et les poitrines plus amples. Pourquoi ? Il semble que les hommes préfèrent spontanément – au moins tant que les conditions de vie sont favorables – des personnes aux grands yeux, car cela leur rappellerait les enfants, dont les yeux occupent une proportion plus importante du visage : cela fait vibrer en eux une fibre protectrice. La finesse de la taille et la largeur des hanches sont des signes de féminité qui distinguent nettement une femme d’un homme, et seraient un signe de fécondité. Or, lorsque les conditions de vie sont favorables, on cherche à se reproduire.
Au contraire, lorsque les temps sont durs, les hommes seraient en quête de femmes aux caractéristiques à la fois plus adultes et plus masculines : les yeux plus petits contrastent avec les grands yeux des enfants, et sont typiquement ceux d’un adulte. La taille plus large et les hanches plus étroites sont des signes de masculinité, et toutes ces caractéristiques réunies deviennent intéressantes lorsqu’il est difficile de gagner sa vie. On cherche alors plus à être protégé qu’à protéger, et l’on a besoin d’un allié qui participe à des tâches masculines, davantage qu’à la reproduction.
Cette vision très sexiste de l’évolution des hommes et des femmes confine au cynisme si l’on accepte l’idée que le jugement esthétique est inconsciemment guidé par des impératifs économiques. C’est pourtant ainsi, prétendent les auteurs de cette étude, que l’espèce humaine aurait traversé les âges. Dans ce cas, il faudrait comprendre la passion de la noblesse du XVIIIe siècle pour les Vénus opulentes : à en croire cette étude, les larges hanches de l’époque reflétaient la prospérité économique de la cour de Louis XIV !

Tiré de Cerveau & Psycho, no 9, février 2005

Vous pouvez aussi lire l'article original : T. Petitjohn et B. Jungeberg, Playboy Playmate curves : changes in facial and body feature preferences across social and economic conditions, in Personality and social psychology bulletin, vol.30, pp. 1186-1197, 2004.