La scytale spartiate

Une forme de transposition utilise le premier dispositif de cryptographie militaire connu, la scytale spartiate, remontant au Ve siècle avant J.-C. La scytale consiste en un bâton de bois autour duquel est entourée une bande de cuir ou de parchemin, comme le montre la figure ci-dessous. L'expéditeur écrit son message sur toute la longueur de la scytale et déroule ensuite la bande qui apparaît alors couverte d'une suite de lettres sans signification. Le messager emportera la bande de cuir, l'utilisant comme ceinture, les lettres tournées vers l'intérieur. Le destinataire enroulera alors cette bande sur son bâton (de même diamètre) pour lire le message clair.

Le petit programme javascript ci-dessous vous permettra de chiffrer/déchiffrer un message chiffré avec une scytale de diamètre donné.

Message clair

Diamètre (1-20)
Message chiffré


Exercice

Décryptez ce message secret: vvt goerlruzo'as uam rvnmaeéae


En 404 avant J.-C., Lysandre de Sparte vit arriver un messager ensanglanté, l'un des cinq survivants d'un éprouvant voyage depuis la Perse. Le messager tendit sa ceinture à Lysandre qui l'entoura autour de sa scytale et apprit que Phranabaze de Perse s'apprêtait à l'attaquer. Grâce à la scytale, Lysandre se prépara à cette attaque et le repoussa. Des historiens grecs tels que Thucydide ou Plutarque mentionnent l'utilisation de ce procédé par les Spartes vers 475 avant Jésus-Christ pour ordonner à un général trop ambitieux de s'allier ou même 100 ans plus tard quand un général spartiate répond à une accusation d'insubordination.

PLUTARQUE / Vies des hommes illustres / Bibliothèque Charpentier, Tome 2 (traduction d'Alexis Pierron)

« Voici, du reste, ce que c'est que la scytale. Quand un général part pour une expédition de terre ou de mer, les éphores* prennent deux bâtons ronds, parfaitement égaux en longueur et en grosseur, de façon à se correspondre exactement l'un à l'autre, dans toutes les dimensions. Ils gardent l'un de ces bâtons, et donnent l'autre au général: ils appellent ces bâtons scytales. Lorsqu'ils veulent mander au général quelque secret d'importance, ils taillent une bande de parchemin, longue et étroite comme une courroie, la roule autour de la scytale qu'ils ont gardée, sans laisser le moindre intervalle entre les bords de la bande, de telle sorte que le parchemin couvre entièrement la surface du bâton. Sur ce parchemin ainsi roulé autour de la scytale, ils écrivent ce qu'ils veulent; et, quand ils ont écrit, ils enlèvent la bande, et l'envoient au général sans le bâton. Le général qui l'a reçue n'y saurait rien lire d'ailleurs, parce que les mots, tout dérangés et épars, ne forment aucune suite; mais il prend la scytale qu'il a emportée, et il roule alentour la bande de parchemin, dont les différents tours, se trouvant alors réunis, remettent les mots dans l'ordre dans lequel ils ont été écrits, et présentent toute la suite de la lettre. On appelle cette lettre scytale, du nom même du bâton, comme ce qui est mesuré prend le nom de ce qui lui sert de mesure. »
Vie de Lysandre, p. 379

* Éphores : Magistrats lacédémoniens au nombre de cinq établis pour contre-balancer l'autorité des rois et du sénat et qu'on renouvelait tous les ans. Ils étaient élus par le peuple. (Littré)


Références


  Didier Müller, 21.1.21