Qui ne connaît pas ce fameux cri de détresse ? Pourtant, si l'on demande au commun des mortels si cela a été respecté sur le Titanic, une majorité va penser que non : on a semble-t-il gardé en mémoire la ségrégation des classes. On a tendance à croire, probablement en raison de l'impact de l'histoire à l'eau de rose du film de James Cameron, que seuls les riches auraient été sauvés ou presque.
Seulement, si l'on s'en tient aux chiffres, ce n'est pas ce qui s'est produit. 70 % des femmes du Titanic ont été en réalité sauvés contre 20 % des hommes. Le principe de sauver les femmes et les enfants en premier a été appliqué. Il y a deux facteurs pour expliquer cela : d'une part, le bateau a mis plus de deux heures à couler, ce qui est inhabituellement long. Par ailleurs, les officiers ont menacé les passagers avec des armes afin que les ordres du capitaine soient respectés.
Le Titanic est un cas particulier. Lors d'un autre naufrage célèbre comme celui du Lusitania par exemple, la force brute masculine l'a emporté. Il en a été de même pour 17 autres naufrages célèbres intervenus entre 1852 et 2011 selon une étude réalisée par des économistes qui ont couvert ainsi la destinée (parfois funeste) de 15000 individus de différentes nationalités. Lorsque le navire coule rapidement, l'instinct de survie passe devant les codes sociaux. La différence du taux de survie entre les deux sexes s'est réduite au cours du temps depuis la première guerre mondiale. La fin des valeurs chevaleresques et machistes ainsi que l'égalité des sexes n'a donc pas toujours du bon pour les femmes.
Dans les faits, le facteur qui influence le plus la survie des femmes provient du capitaine : quels ordres donne-t-il ? Sauf pour le Titanic, l'équipage, dont le capitaine (7 décès sur 16 naufrages), est bien moins susceptible de mourir dans l'accident que les passagers... Bref, lors d'un naufrage, c'est souvent « Chacun pour soi et Dieu pour tous ».
Si cela vous étonne que ce soient des économistes qui aient réalisé cette étude, il vous faut comprendre que ces derniers, pour établir des modèles cohérents, ont besoin de comprendre quelle est la part de rationalité des individus (est-ce qu'ils agissent comme le ferait un robot ?) dans un contexte particulier (ici, le "sauve qui peut").
PS : les enfants ? Ah oui ! j'avais oublié : en moyenne, ils sont les derniers à survivre.

Pour aller plus loin : Mikael Elinder, Oscar Erixson Every man for himself: Gender, Norms and Survival in Maritime Disasters

Source : Sur-la-Toile